Réorganiser le continuum hyper-industriel ?

Suite de notre série sur les écosystèmes industriels en milieu métropolitain.  Le billet précédent présentait l’industrie du futur comme un facteur de encourageant à la (re)localisation d’activités industrielles dans les pays développés. A la suite de ce billet, nous suggérons quelques voies d’organisation territoriale pour favoriser le développement d’activités industrielles.

Un objectif de politique économique peut donc être d’organiser la complémentarité entre métropoles à vocation d’expérimentation et de commandement, avec des pôles de taille moyenne à vocation plus industrielle. [Cf. En ce sens un article de Michaël Valentin, “L’industrie du Futur, ciment des ‘deux France’”, La Tribune, 17 janvier 2017.   ] L’optimisation de ces relations peut permettre de faciliter sinon la réindustrialisation du moins de ramener la désindustrialisation au même rythme que nos voisins.

Nous citerons deux études, qui portent chacune sur deux niveaux différents.

La localisation des activités industrielles au niveau international relève de choix de filières nationaux

En conclusion d’un livre publié en 2000, Global trade and conflicting national interests, [MIT Press, 2000.] Baumol et Gomory faisaient deux constats :

- Quand la théorie des avantages comparatifs a été établie, le commerce international représentait 1% de l'activité économique. Les avantages comparatifs étaient, par ailleurs, largement fixes, liés à des "avantages naturels". Aujourd'hui les avantages comparatifs peuvent être acquis par n'importe quel pays, les rendements sont largement croissants et les avantages retirés d'une activité économique restent largement locaux. Les bénéfices rapatriés dans le pays d'origine des sociétés ne sont qu'une fraction minoritaire de la valeur ajoutée ;

- Il y a une récompense au leader sur chacun des marchés. La position dominante sur un marché est plus facile à tenir que celle de "challenger".

Ils préconisaient en conséquence que les pays se soucient de leur rang dans chacun des secteurs de l'économie, et choisissent de se positionner de façon volontariste sur des activités.

C’est une première réflexion qui invite à des choix nationaux.

L'étude des champions cachés plaide pour une localisation presque rurale de l'activité industrielle

Au niveau plus local, une étude de Hermann Simon porte sur les “champions cachés”.

Ce sont des entreprises de moins de trois milliards d’euros de CA, sur des marchés de niche, avec une position dans les trois premiers de leur marché au niveau mondial. Très largement ce sont des entreprises industrielles qui constituent le coeur du Mittelstand.

Il en a étudié près de trois mille. Il a constaté que 2/3 de ces champions ont un siège en zone rurale. Moins de « distractions », un pouvoir d’achat plus élevé, pas d’embouteillages, assurent un environnement favorable.

Il y a donc une vraie rationalité à un éloignement entre industrie et métropole.

Il cite ainsi le village de Windhagen, en Allemagne, 5 000 habitants, à 40 kilomètres de Bonn, qui compte trois champions cachés : l’un dans le recyclage de routes, l’autre dans les solariums et le troisième dans la détection vidéo. La culture locale d’excellence lui paraît donc un facteur plus important que les éventuels effets d’agglomération sectorielle, ou “pôles de compétitivité”.

Windhagen

Firma Wirtgen an der Bundesautobahn 3, Windhagen: Luftaufnahme - Auteur : Wolkenkratzer

Enfin, l’exemple des champions cachés peut inciter à rapprocher géographiquement R&D et production. Pour les entreprises étudiées par Simon, l’innovation survient le plus souvent dans les processus de production (“l’innovation processus est plus importante que l’innovation produit” ). Les champions cachés, de façon générale, rejettent l’externalisation, jusqu’à fabriquer eux-mêmes, comme Gardena, leurs propres machines-outils.

Deux idées à retenir en termes de choix industriels : au niveau international la localisation des activités est assez libre, et au niveau national, la localisation dans des territoires ruraux ou des villes moyennes est un facteur positif pour l'industrie.

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